Santé et famille dans la fonction publique : les nouvelles mesures annoncées par l'ordonnance du 25 novembre 2020

L'ordonnance n°2020-1447 du 25 novembre 2020 est prise en application de la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019, et plus particulièrement son article 40 pour les dispositions suivantes :

2° Faciliter la prise en charge des personnels des employeurs mentionnés au même article 2 en simplifiant l'organisation et le fonctionnement des instances médicales et de la médecine agréée ainsi que des services de médecine de prévention et de médecine préventive, et en rationalisant leurs moyens d'action ;

3° Simplifier les règles applicables aux agents publics relatives à l'aptitude physique à l'entrée dans la fonction publique, aux différents congés et positions statutaires pour maladies d'origine non professionnelle ou professionnelle ainsi qu'aux prérogatives et obligations professionnelles des agents publics intervenant dans les dossiers d'accidents du travail et de maladies professionnelles ;

4° Etendre les possibilités de recours au temps partiel pour raison thérapeutique et au reclassement par suite d'une altération de l'état de santé pour favoriser le maintien dans l'emploi des agents publics ou leur retour à l'emploi ;

5° Clarifier, harmoniser et compléter, en transposant et en adaptant les évolutions intervenues en faveur des salariés relevant du code du travail et du régime général de sécurité sociale, les dispositions applicables aux agents publics relatives au congé de maternité, au congé pour adoption, au congé supplémentaire à l'occasion de chaque naissance survenue au foyer de l'agent, au congé de paternité et d'accueil de l'enfant et au congé de proche aidant.

L'ordonnance est découpée en cinq chapitres relatifs :

  • à l'aptitude physique à l'entrée dans la fonction publique (chapitre 1). La condition générale d'aptitude physique à l'entrée dans la fonction publique est remplacée par des conditions de santé particulières exigées pour l'exercice de certaines fonctions relevant de certains corps ou cadre d'emplois en raison des risques spécifiques que ces fonctions comportent pour les agents ou pour les tiers et des sujétions que celles-ci impliquent. Les statuts particuliers fixeront la liste de ces fonctions ainsi que les règles générales suivant lesquelles ces conditions de santé particulières sont appréciées.

  • aux instances médicales et à la médecine de prévention. Il s'agit, ici, de simplifier et rationnaliser l'organisation et le fonctionnement des instances médicales de la fonction publique (comités médicaux et commissions de réforme) en instituant une instance médicale unique, le conseil médical. Elle aura compétence en matière de congés pour raisons de santé et de congé pour invalidité temporaire imputable au service. Elle devient ainsi référence unique pour tous les textes applicables aux fonctionnaires civils se rapportant à ces sujets. Mais elle est assujettie aux dispositions réglementaires à venir. L'entrée en vigueur de cette disposition (article 2) est prévue au 1er février 2022.

  • aux congés pour raisons de santé. La terminologie évolue et le congé de maladie devient le congé pour raisons de santé, regroupant selon l'article 21 de la loi du 13 juillet 1983 : le congé de maladie, le congé de longue maladie et le congé de longue durée (article 4).
    L'article 5 vise à clarifier les droits à congé de longue maladie et à congé de longue durée en précisant que leur utilisation peut être de manière continue ou discontinue et instaure, par ailleurs, la "portabilité" de ces congés ainsi que des modalités d'utilisation afférentes en cas de mobilité intra et inter-versants de la fonction publique du fonctionnaire bénéficiaire de l'un de ces congés. Autrement dit, le fonctionnaire qui a obtenu un CLD ou un CLM en conserve le bénéfice auprès de toute personne publique qui l'emploie ainsi que les modalités d'utilisation afférentes.
    L'article 6 renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser les modalités d'octroi et de maintien des congés pour raison de santé et du service à temps partiel pour raison thérapeutique ainsi que les modalités du bénéfice d'une formation ou d'un bilan de compétences ou de pratiquer une activité durant les congés pour raison de santé et le congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque celle-ci est de nature à favoriser la réadaptation ou la reconversion professionnelle du fonctionnaire. Cet article supprime, par ailleurs, la possibilité de fixer des obligations au fonctionnaire en congé pour raison de santé en vue du rétablissement de sa santé compte tenu du fait que cette obligation actuellement prévue n'a pas reçue d'application effective.
    L'article 7 renforce le cadre du secret professionnel auquel sont astreints les agents publics travaillant au sein des services administratifs en charge des dossiers d'accidents de service et de maladies professionnelles en leur permettant d'avoir connaissance des seuls renseignements médicaux ou pièces médicales dont la production est nécessaire à l'examen des droits du fonctionnaire.
    L'article 8 permet le versement des prestations du régime des accidents et maladies professionnels des fonctionnaires pour des périodes antérieures à la date de création du tableau de maladie professionnelle liées à une infection au SARS-CoV2 puisque c'est la date de la première constatation médicale de cette maladie qui est prise en compte.

  • au maintien dans l'emploi et retour à l'emploi des agents publics. L'article 9 ouvre la possibilité de travailler à temps partiel pour raison thérapeutique en l'absence d'arrêt maladie préalable puisque le fonctionnaire est en activité, et élargit la portée ce dispositif au maintien et au retour à l'emploi. Il instaure également la possibilité de reconstituer les droits de l'agent après un délai minimal d'un an. Le fonctionnaire autorisé à accomplir un service à temps partiel pour raison thérapeutique conserve le bénéfice de l'autorisation qui lui a été donnée auprès de toute personne publique qui l'emploie.
    L'article 10 instaure la possibilité, pour les fonctionnaires déclarés inaptes à l'exercice de leurs fonctions pour raisons de santé, de bénéficier d'un reclassement entre versants de la fonction publique avec maintien d'une priorité dans leur administration d'origine. Mais, et c'est une grande nouveauté, par dérogation, la procédure de reclassement peut être engagée en l'absence de demande de l'intéressé qui dispose en ce cas de voies de recours. Enfin, le régime de la période de préparation au reclassement est ouvert non seulement aux agents à l'égard desquels une procédure d'inaptitude a été engagée (cas actuel) mais également à ceux qui ont été reconnus inaptes (nouveau). L'entrée en vigueur des nouvelles règles du temps partiel pour raison thérapeutique est différée au plus tard au 1er juin 2021.

  • aux congés pour raisons familiales. L'article 11 vise à rendre plus lisibles les congés liés à la parentalité en réorganisant les articles des trois lois statutaires listant le congé de maternité, le congé de naissance, le congé pour l'arrivée d'un enfant placé en vue de son adoption, le congé d'adoption et le congé de paternité et d'accueil de l'enfant. Cet article permet également d'harmoniser le régime de chacun de ces congés en renvoyant directement aux durées applicables aux salariés du secteur privé correspondantes afin d'assurer une stricte équité de traitement entre les bénéficiaires quel que soit leur régime. Par ailleurs, cet article vise à prendre en compte les évolutions intervenues dans le secteur privé, ce qui permet d'appliquer aux fonctionnaires les mesures relatives :
    - d'une part, au congé de naissance visant à élargir ce congé aux situations d'accueil de l'enfant en vue de son adoption et à l'ouvrir au conjoint, partenaire de pacte civil de solidarité ou concubin de la mère sans être le père de l'enfant ;
    - d'autre part, au congé de paternité et de l'accueil de l'enfant visant à créer une période supplémentaire d'une durée maximale de trente jours consécutifs lorsque l'enfant est hospitalisé immédiatement après sa naissance, pendant toute la période d'hospitalisation dans une ou plusieurs unités de soins spécialisés.
    Un décret en Conseil d'Etat définira les conditions d'attribution de ces congés, notamment pour maintenir le fractionnement du congé de paternité et d'accueil de l'enfant spécifique à la fonction publique.
    Les renvois au code du travail permettront également que toute réforme future des durées des congés liés à la parentalité dans le secteur privé seront applicables aux fonctionnaires, notamment celles relatives à l'allongement des durées du congé de paternité et de l'accueil de l'enfant et du congé d'adoption prévu par le projet de loi de financement de sécurité sociale (PLFSS)pour 2021.
    L'article 12 permet d'ajouter la notion de durée maximale du congé de proche aidant en cohérence avec les dispositions applicables aux salariés du secteur privé et dans un objectif de gestion souple de ce congé.


L'article 14 précise les modalités de gestion de la période transitoire vers les nouvelles règles :

- en matière de condition d'aptitude physique à l'entrée dans la fonction publique, les dispositions antérieures demeurent applicables jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions réglementaires prise pour l'application de l'article 1er et au plus tard jusqu'à deux ans suivant la publication de l'ordonnance ;
- en matière d'instance médicale, afin de ne pas saisir à nouveau les instances, les avis rendus par les comités médicaux et les commissions de réforme rendus avant la date d'entrée en vigueur de l'article 2 (= 01/02/2022) mais n'ayant pas encore donné lieu à une décision administrative sont réputés être des avis rendus par les conseils médicaux ;
- en matière de temps partiel pour raison thérapeutique, afin de ne pas remettre en cause les situations constituées, les fonctionnaires bénéficiant de ce dispositif continuent la période en cours selon les dispositions antérieures jusqu'au terme de cette période. Par ailleurs, les modalités de reconstitution des droits à temps partiel pour raison thérapeutique sont précisées pour ceux des fonctionnaires qui avaient épuisés ce droit.