Le droit de se taire lors d'une procédure disciplinaire : suite (et fin ?)

La décision du Conseil constitutionnel était attendue et, sans surprise, consacre le droit de se taire dans le cadre d'une instance disciplinaire.

Il n'y a pas de réelle surprise étant donné qu'il avait déjà statué en ce sens dans sa décision n°2023-1074 QPC du 8 décembre 2023 (notaires et officiers publics et ministériels) ou dans sa décision n°2024-1097 QPC du 26 juin 2024 relative à un magistrat (saisi par le Conseil d'État, décision n°491226 du 19 avril 2024). D'ailleurs, la CAA de Paris, dans son arrêt n°22PA03578 du 2 avril 2024 reprend exactement cette analyse pour un aide médico-psychologique (voir également l’ordonnance n° 2400163 du TA de Cergy-Pontoise du 1er février 2024, voir notre commentaire de l'arrêt de la CAA de Paris dans nos FJH de mai 2024).

 

Le CC énonce, dans sa décision n°2024-1105 QPC du 4 octobre 2024, que “les déclarations ou les réponses du fonctionnaire devant cette instance sont susceptibles d’être portées à la connaissance de l’autorité investie du pouvoir de sanction.” Ici, il s'agit du fonctionnaire et du code général de la fonction publique.

De fait, les dispositions de l'article L.532-4 du code général de la fonction publique, reprenant une partie de celles de l'article 19 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 abrogée, ne contiennent aucune disposition sur le droit de se taire. 

Ce droit est contenu à l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, aux termes duquel “Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi”. 

15. Dès lors, en ne prévoyant pas que le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée doit être informé de son droit de se taire, les dispositions contestées méconnaissent les exigences de l’article 9 de la Déclaration de 1789. Par conséquent, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres griefs, elles doivent être déclarées contraires à la Constitution.

 

Le Conseil constitutionnel relève cependant que “l’abrogation immédiate des dispositions déclarées inconstitutionnelles de l’article L. 532-4 du code général de la fonction publique aurait pour effet de supprimer l’obligation pour l’administration d’informer le fonctionnaire poursuivi disciplinairement de son droit à communication du dossier.” L'abrogation est reportée au 1er octobre 2025 mais, les dispositions étant inconstitutionnelles, “jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi ou jusqu’à la date de l’abrogation de ces dispositions, le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée doit être informé de son droit de se taire devant le conseil de discipline.

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