LFSS 2025 : le Conseil constitutionnel exclut 14 articles

Aux termes d'un long processus, la loi de financement de la Sécurité sociale 2025 n°2025-199 du 28 février 2025 vient d'être publiée après avoir été portée devant le Conseil constitutionnel qui a censuré quatorze de ses articles dans sa décision n°2025-875 CD du 28 février 2025.

La LFSS 2025 complète la réglementation sur la télémédecine en excluant qu'un fournisseur de services en ligne puisse mettre en place une plateforme visant à fournir à titre principal, explicitement ou implicitement, des actes de télémédecine prescrivant ou renouvelant un arrêt de travail. De plus, un acte de télémédecine effectué par un professionnel de santé exerçant son activité à titre principal à l'étranger ne peut donner lieu à la prescription ou au renouvellement d'un arrêt de travail, quelle qu'en soit la durée. 

Elle prévoit également des consultations longues de suivi gynécologique et en santé sexuelle au bénéfice des femmes en situation de handicap résidant dans les établissements ou services d'enseignement qui assurent, à titre principal, une éducation adaptée et un accompagnement social ou médico-social aux mineurs ou jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d'adaptation,  ou dans les établissements et les services, y compris les foyers d'accueil médicalisé, qui accueillent des personnes handicapées ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert et enfin dans les établissements ou services à caractère expérimental. Plus largement, les personnes handicapées résidant dans ces établissements bénéficient de séances d'éducation à la vie sexuelle et affective et de sensibilisation aux violences sexuelles et sexistes. 

S'agissant de la prise en charge de séances d'accompagnement réalisées par un psychologue, le code de la sécurité sociale, en son article L.162-58, est modifié notamment pour préciser que « Les psychologues choisis par le patient pour réaliser ces séances appartiennent à son équipe de soins dans les conditions fixées à l'article L. 1110-12 du code de la santé publique. »

Sur le recours à des personnels médicaux, odontologistes, pharmaceutiques pour des missions de travail temporaire, les dispositions nouvelles sont plus incisives. Tout d'abord, ce recours est élargi aux “sages-femmes et des professionnels relevant du titre IV du livre II et du livre III de la quatrième partie du présent code dans les conditions prévues à l'article L. 334-3 du code général de la fonction publique. ” Ensuite, et surtout, lorsqu'il existe, pour l'une de ces catégories, un écart significatif entre le coût d'une mise à disposition d'un personnel par une entreprise de travail temporaire et le coût de l'emploi d'un professionnel permanent, le montant des dépenses susceptibles d'être engagées par les établissements publics de santé au titre de ces prestations est plafonné, en tenant compte s'il y a lieu des spécificités territoriales. Les conditions d'application du présent alinéa sont fixées par voie réglementaire (article L.6146-3 CSP). Cela s'applique aux contrats conclus à compter du 1er juillet 2025.

 

Ce que le Conseil constitutionnel a validé

En premier lieu, l'ONDAM rectifié pour 2024 à 256,9 milliards d'euros et arrêté à 265,9 milliards d'euros pour l'année 2025 ne méconnaît aucune exigence constitutionnelle et en particulier le onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 selon lequel la Nation « garantit à tous … la protection de la santé ». 

En deuxième lieu, le CC était saisi d'un renforcement des règles relatives à la prise en charge de produits de santé et prestations associées, d'actes réalisés par un professionnel de santé ou de transports de patient pouvant être subordonnée, lorsqu'elle est particulièrement coûteuse pour l'assurance maladie ou en cas de risque de mésusage, à la présentation par le patient d'un document, établi par le prescripteur, indiquant que celui-ci a préalablement consulté son dossier médical partagé ou que sa prescription respecte les indications ouvrant droit au remboursement ce qui, pour les requérants, pourrait conduire le patient à renoncer à ces soins pour des raisons indépendantes de sa volonté. En l'absence de présentation de ce document, il n'y a pas de prise en charge. Le patient doit en être informé par le prescripteur. Le Conseil constitutionnel ne censure pas mais impose l'information préalable du patient et impose également au prescripteur, lorsqu'il a prescrit au patient un soin qui aurait dû ouvrir droit à une prise en charge, d'établir ou de modifier ce document dans des délais adaptés à l'état de santé du patient et sans qu'il ne puisse en résulter des frais supplémentaires pour ce dernier.

 

Ce que le Conseil constitutionnel censure

La nouvelle organisation du contrôle médical n'a pas sa place dans cette loi. Les dispositions sont contraires à la Constitution.

La fameuse “taxe lapin” est également rejetée car la nature de la pénalité susceptible de s'appliquer en vertu des dispositions contestées, l'encadrement son montant ainsi que les conditions de sa mise en œuvre ne sont pas définis.

Enfin, plusieurs dispositions sont censurées comme n'ayant pas d'effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses ou les recettes des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement. Elles ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées aux articles LO 111-3-6 à LO 111-3-8 du code de la sécurité sociale. Dès lors, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale. Il s'agit de :

"45. L'article 34 prévoit les conditions selon lesquelles les cotisants peuvent se faire assister d'un conseil dans le cadre de certaines procédures.
46. L'article 36 prévoit que la loi, et non un arrêté ministériel, détermine désormais chaque année le niveau de minoration du montant versé à l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage pour compenser la perte de cotisations résultant du dispositif de réduction dégressive des cotisations dues par les employeurs au titre de l'assurance chômage sur les bas salaires.
47. L'article 42 complète l'objet de certaines conventions pouvant être conclues entre les organisations représentatives des professionnels de santé et l'assurance maladie.
48. L'article 44 précise le régime juridique applicable aux structures de soins non programmés.
49. L'article 49 vise à organiser certains échanges d'information entre les organismes d'assurance maladie obligatoire et les organismes d'assurance maladie complémentaire.
50. L'article 50 précise certaines conditions de sécurisation, de délivrance et d'utilisation par les professionnels de santé du moyen d'identification électronique interrégimes dont bénéficie chaque assuré.
51. L'article 53 prévoit la possibilité d'inclure, dans certaines conventions conclues avec l'assurance maladie, des mesures incitant à l'utilisation du dossier médical partagé par les professionnels de santé libéraux et les établissements de santé.
52. L'article 58 autorise les conseils nationaux professionnels et associations d'usagers agréées à proposer à la Haute Autorité de santé de s'autosaisir de l'évaluation du service attendu ou du service rendu d'un acte ou d'une prestation.
53. L'article 60 prévoit que les entreprises de transport sanitaire doivent équiper l'ensemble de leurs véhicules d'un dispositif de géolocalisation certifié par l'assurance maladie et d'un système électronique de facturation intégré.
54. L'article 74 prévoit que les indemnités de fonction perçues par un élu local ne sont pas cumulables avec le bénéfice d'indemnités journalières.
55. L'article 84 dispose que le personnel des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes peut comprendre un infirmier coordonnateur.
56. L'article 94 prévoit la remise au Parlement d'un rapport portant sur les travaux de réforme du financement de l'accueil du jeune enfant."

 

 

Jurisprudence
Le point sur
Le point sur web
Questions-réponses