L'analyse de la Cour des comptes sur la T2A

Publié en juillet 2023

DIM T2A Groupe homogène de séjour (GHS) GHM Financement Cour des comptes GHT

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Instaurée par la loi de financement de la Sécurité sociale 2004, la tarification à l'activité, dite T2A, fait reposer les ressources des établissements de santé au regard de la mesure de l'activité produite mais elle est critiquée depuis quelques temps par beaucoup de spécialistes, qui y voient un système favorisant une course à la rentabilité. Le Président Macron avait, lors de sa dernière campagne, promis de limiter sa part à 50% dans le financement des établissements de santé. La T2A est néanmoins restreinte au champ MCO et le financement par dotation demeure toujours.

Lors de son audition du 6 juillet par la Commission des affaires sociales du Sénat, François Braun, alors ministre de la santé, constatait également que  la T2A est une réponse adaptée à l’offre, mais pas aux besoins et qu’elle a pu permettre des dérives de financements dans une « logique concurrentielle » avec une préférence pour les activités rentables. Il avançait alors une approche territoriale, autour de trois axes de financement (voir notre veille du 07/07/2023).

La Cour des comptes a analysé la T2A et vient de rendre public son rapport. Elle indique d'emblée que “la tarification à l’activité doit continuer à représenter une part significative du financement des établissements de santé” et ce, pour “conserver sa vocation première d’outil incitant à la réduction des coûts et à l’efficience”.

La Cour des comptes considère que la T2A a tenu une large partie de ses promesses initiales. Mais l'institution pointe une maîtrise imparfaite des groupes homogènes de séjours (GHS), traduction économique des groupes homogènes de malades (GHM). Ainsi, “entre 2009 et 2022, le nombre de GHM a progressé de 15 % pour le secteur public et de 15,2 % pour le secteur privé lucratif. Au cours de la même période, le nombre de GHS a augmenté de 58,6 % pour le secteur public et de 60,1 % pour le secteur privé”. La Cour en déduit qu'il faut resserrer le périmètre de certains GHM moins utilisés, d'autant que "près d’un tiers des GHS sont peu ou pas utilisés". 

En outre, l'on dénombre des situations de sous ou sur-financements : “dans le secteur public, l’ambulatoire en médecine, la chirurgie ambulatoire et interventionnelle, l’obstétrique et la néonatalogie sont en situation de sous-financement tandis que l’hospitalisation complète en médecine et en chirurgie ainsi que, très nettement, la radiothérapie sont en situation de sur-financement”. 

Ce faisant, la Cour des comptes conclut également aux dérives de la T2A mais considère que sa part dans le financement des établissements dépend du statut dudit établissement. 

Mais la T2A n'a pas vocation à être abandonnée ; il convient qu'elle soit “fondée sur les principes de transparence des hypothèses et des procédures de décision, de tarifs neutres par rapport aux coûts, enfin de signal-prix fiable et clair permettant une meilleure allocation des ressources”. Les dépenses hospitalières doivent être régulées par des outils adaptés car si l'on réduit la “part de tarification à l’activité dans le financement des établissements”, cela réduira “mécaniquement la masse financière que la T2A représentera dans l’Ondam”. Ainsi, les règles de la comptabilité analytique hospitalière doivent être harmonisées entre le public et le privé “afin de permettre, d’une part, à chaque établissement de comparer ses coûts aux tarifs et, d’autre part, de favoriser les comparaisons des coûts entre les établissements de santé”. Le codage de l'activité hospitalière, qui est réalisé par les départements d'information médicale (DIM),  doit également être maintenu “à des fins de connaissances scientifiques et épidémiologiques” mais unifié pour les groupements hospitaliers de territoire (depuis 2016, le DIM doit être une fonction mutualisée au niveau du GHT).

Enfin, il faut rénover le pilotage de la T2A.

La Cour des comptes formule cinq propositions :

- Réduire le nombre de groupes homogènes de séjours de manière à garantir que chacun d’eux préserve une base suffisamment large pour que le calcul d’un coût moyen du séjour conserve une signification ainsi qu’une incitation à l’efficience.

- Harmoniser dès 2024, pour l’ensemble des établissements publics et privés, les règles de la comptabilité analytique hospitalière et les rendre obligatoires, afin de permettre, d’une part, à chaque établissement de comparer ses coûts aux tarifs et, d’autre part, de favoriser les comparaisons des coûts entre les établissements de santé.

- Unifier les pratiques de codage dans les groupements hospitaliers de territoire, sous l’autorité des DIM de territoire.

- Rendre publics les programmes, les algorithmes, les hypothèses et les retraitements relatifs au dispositif de collecte des coûts et de construction des tarifs.

- Éliminer les écarts de tarifs non justifiés par les coûts des différents GHS ou par des décisions correspondant à des objectifs de santé publique.