La proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé est définitivement adoptée

Après de longs mois, la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé a été adoptée le 25 juin à l'Assemblée nationale.

Ce texte est l'aboutissement de travaux précédemment engagés avec le plan pour la sécurité des professionnels de santé élaboré sur la base du rapport remis le 8 juin 2023 par le Dr Jean-Christophe Masseron, président de SOS Médecins, et Nathalie Nion, cadre supérieure de santé à l’AP-HP puis le dépôt de la proposition de loi en janvier 2024.

Le code pénal, le code de procédure pénale et le code de la santé publique sont ainsi modifiés pour intégrer les nouvelles dispositions.

Les professionnels de santé travaillant dans divers établissements (hôpitaux, cabinets libéraux, pharmacies, laboratoires, maisons de naissance, établissement ou service social ou médico-social etc.) sont protégés plus largement lorsqu'ils sont victimes de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner (article 222-8 du code pénal), de violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente (art. 222-10 du code pénal), violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours (art. 222-12 du code pénal) ou violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ayant entraîné aucune incapacité de travail (art. 222-13 du code pénal).

De plus, les sanctions majorées (7 ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende) sont également applicables dans les cas d'agressions sexuelles autres que le viol lorsque l'infraction est commise sur un professionnel de santé durant l’exercice de son activité (art. 222-28 du code pénal).

Le vol est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende lorsqu'il porte sur du matériel médical ou paramédical ou lorsqu’il est commis dans un établissement de santé ou au préjudice d’un professionnel de santé à l’occasion de l’exercice ou en raison de ses fonctions, ce qui est beaucoup plus large que la mention précédente qui ne visait que le matériel médical destiné à prodiguer des soins de premiers secours (article 311-4, 5° du code pénal).

Le délit d'outrage prévu à l'article 433-5 du code pénal est élargi aux professionnels de santé et s'applique aussi à l'intérieur d'un établissement de santé, d’un centre de santé, d’une maison de santé, d’une maison de naissance, d’un cabinet d’exercice libéral d’une profession de santé, d’une officine de pharmacie, d’un laboratoire de biologie médicale, d’un établissement ou d’un service social ou médico-social, du domicile du patient ou aux abords d'un tel établissement. Ce faisant, le code de la santé publique est modifié pour intégrer l'outrage. 

Les employeurs peuvent déposer plainte pour le compte des victimes, avec leur consentement écrit, sauf si l'infraction est commise par un professionnel de santé ou un membre du personnel sans que l'employeur ait la qualité de victime. Cette possibilité ne dispense pas l’employeur du respect des obligations prévues au second alinéa de l’article 40 du code de procédure pénale qui impose à toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

Les ordres professionnels peuvent agir en justice pour défendre l'intérêt collectif des professions de santé en cas de menaces, outrages ou violences. Les ordres professionnels ou les unions régionales de professionnels de santé peuvent porter plainte pour le compte des médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes ou pédicures-podologues qui en font expressément la demande.

Les professionnels de santé, militaires et fonctionnaires bénéficient d'une protection juridique accrue en cas de mise en cause pénale liée à leur activité. Le code général de la fonction publique est notamment modifié en ce sens (comme le code de la sécurité intérieure) et l'article L.134-4, relatif à la protection dans l'exercice des fonctions est  réécrit. C'est l'occasion de mettre le texte en conformité avec la décision n°2024-1098 QPC du 4 juillet 2024, par laquelle le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution les deux derniers alinéas de l’article L. 134-4 du code général de la fonction publique et reporté l'abrogation au 1er juillet 2025 (voir notre veille “Protection fonctionnelle : le Conseil constitutionnel tranche en faveur de l'extension”). Du fait de cette abrogation, l'article L.134-4 est réduit à la protection accordée lorsque l'agent public fait l'objet de poursuites pénales à raison de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions. L'article est complété en ce sens que le dernier alinéa (inconstitutionnel) est réécrit : La collectivité publique est également tenue de protéger l'agent public mis en cause pénalement en raison de tels faits qui ne fait pas l’objet des poursuites mentionnées au premier alinéa ou qui fait l’objet de mesures alternatives à ces poursuites, dans tous les cas où le code de procédure pénale lui reconnaît le droit à l’assistance d’un avocat.

L'adresse professionnelle d'un professionnel de santé exerçant en libéral peut d'ailleurs être déclarée dans certaines procédures.