Mise en oeuvre partielle des propositions du médecin du travail et danger grave et imminent : l'analyse du Conseil d'État

Dans son arrêt n°470052 du 21 mars 2025 portant sur un maître contractuel de l'enseignement privé reconnu bénéficiaire de l'obligation d'emploi en tant que travailleur handicapé, le Conseil d'État analyse le droit de retrait exercé par cet agent au regard des préconisations du médecin de la prévention.

En l'occurrence, atteint d'un trouble visuel très important, l'intéressé a exercé son droit de retrait en faisant valoir que le poste qui lui avait été confié ne répondait pas aux exigences d'aménagement fixées par la médecine de prévention. Concrètement, il a bénéficié d'un arrêt maladie (1er septembre 2014 au 15 septembre 2014) puis a exercé son droit de retrait (à partir du 16 septembre) et n'a repris son poste qu'après mise en demeure en du 4 juin 2015 pour finalement présenté sa démission par lettre du 24 septembre 2015.

Il a saisi le tribunal administratif aux fins d'indemnisations et, n'ayant pas obtenu totalement gain de cause, y compris en appel, le contentieux est arrivé devant le Conseil d'État. Notamment, la période entre l'exercice de son droit de retrait et la reprise de ses fonctions n'avait pas été prise en compte au titre de l'indemnisation demandée.

L'intérêt principal de l'arrêt est l'analyse que fait le CE de la notion de danger grave et imminent qui permet à un agent public d'exercer son droit de retrait sans conséquence pour sa carrière. 

Le droit de retrait est exercé dès lors qu'un agent  “a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection” selon l'article L. 4131-1 du Code du travail. C'est un droit subjectif puisqu'il repose sur l’appréciation de l'agent concerné.

En l'occurrence, l'intéressé estimait que les mesures proposées par le médecin de la prévention, visant à lui permettre d'exercer ses fonctions, n'avaient pas été mises en place. En l'espèce, l'administration avait réagi à partir du 3 novembre 2014 mais l'agent avait refusé certains aménagements et n'avait repris ses fonctions qu'après mise en demeure quelques mois plus tard. 

Le CE souligne que “La seule circonstance que l'autorité administrative n'a pas mis en œuvre tout ou partie des propositions d'aménagements de poste de travail ou de conditions d'exercice des fonctions émises par le médecin de prévention ne constitue pas pour l'agent concerné, en principe, un motif raisonnable de penser que l'exercice de ses fonctions présente pour lui un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé qui justifierait son retrait.”

Mais, cela suppose qu'il y ait au moins un commencement ; dès lors, la période antérieure aux aménagements mis en place par l'administration entre dans la qualification du droit de retrait. La période postérieure. L'agent n'est fondé “à demander l'annulation de l'arrêt attaqué, en tant qu'il statue sur sa demande d'indemnisation au titre des rémunérations non perçues pendant la période d'exercice de son droit de retrait, que pour la période comprise entre le 16 septembre et le 2 novembre 2014 inclus.”