Publié en juin 2025
Mise à disposition Intérim Entreprise de travail temporaire (ETT) Sages-femmes Contrat de mise à disposition Auxiliaires médicaux
Voir également :La loi n°2023-1268 du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels a encadré la mise à disposition de certains personnels par des entreprises de travail temporaire aussi bien dans le champ du Code de l'action sociale et des familles que dans le Code de la santé publique en exigeant que ceux-ci aient exercé leur activité dans un cadre autre qu'un contrat de mission conclu avec une de ces entreprises de travail temporaire pendant une durée minimale (article 29, I et II de la loi).
Le décret n°2024-583 du 24 juin 2024 a fixé cette durée minimale dans un cadre autre qu'un contrat de mission, et s'applique aux contrats de mise à disposition signés à compter du 1er juillet 2024. Elle est de deux ans, en équivalent temps plein à condition que, pendant ces périodes, il ait exercé, s'agissant des professions réglementées, " la même profession et, le cas échéant, la même spécialité " et, pour les professions non règlementées, " la même fonction " que celle pour laquelle sa mise à disposition est envisagée.
Ce texte a été contesté devant le Conseil d'État qui vient de l'annuler dans sa décision n°495797 du 06 juin 2025.
Le CE rappelle que "aux termes de l'article 4 de la directive 2008/104/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative au travail intérimaire : " 1. Les interdictions ou restrictions concernant le recours aux travailleurs intérimaires sont uniquement justifiées par des raisons d'intérêt général tenant, notamment, à la protection des travailleurs intérimaires, aux exigences de santé et de sécurité au travail ou à la nécessité d'assurer le bon fonctionnement du marché du travail, et d'empêcher les abus. (...) ".
Il analyse l'article 29 de la loi du 27 décembre 2023 comme manifestant la volonté du législateur de “veiller à un meilleur accompagnement des jeunes diplômés ou des jeunes professionnels, en leur imposant d'inscrire le début de leur exercice professionnel au sein d'équipes stables, et éviter qu'ils n'exercent, au début de leur carrière, dans un cadre regardé comme défavorable à la continuité des soins et à l'équilibre financier du système de santé. ”
Cependant, cela ne peut “s'appliquer en outre, à compter de leur entrée en vigueur, à tous les professionnels qui exerçaient déjà dans le cadre de contrats passés avec des entreprises de travail temporaire et [comme] ayant, en conséquence, pour effet de leur interdire de poursuivre leur activité dans un tel cadre, quelle que soit la durée de leur ancienneté, si, pour l'ensemble de leur carrière passée, ils ne peuvent justifier avoir exercé dans un autre cadre que le travail temporaire selon la durée minimale exigée."
Autrement dit, le délai de 2 ans imposé à compter du 1er juillet 2024 ne peut concerner que “les personnes appelées à conclure, pour la première fois, un contrat de mise à disposition avec une entreprise de travail temporaire postérieurement à leur entrée en vigueur.” Or, le Conseil d'État juge que le décret ne précise pas cet point et méconnaît alors "la portée de la loi" : “Le décret du 24 juin 2024 est annulé en tant qu'il ne restreint pas son application aux contrats de mise à disposition des seuls professionnels concluant, pour la première fois après son entrée en vigueur, un contrat de mission avec une entreprise de travail temporaire.”
L'on peut ainsi espérer que de nouveaux textes vont intervenir sous peu car le Conseil d'État a, dans son arrêt n°495033 du 28 novembre 2024, enjoint au Premier ministre “d'abroger l'article R. 6146-26 du code de la santé publique dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision et d'adopter, dans le même délai, des dispositions réglementaires conformes aux dispositions du 2ème alinéa de l'article L. 6146-3 du code de la santé publique.” Il considère que le montant fixé n'est pas conforme à la réglementation car il "méconnaît les dispositions du second alinéa de l'article L. 6146-3 du code de la santé publique" qui vise “le montant journalier des dépenses”, autrement dit, tout compris. D'une pierre deux coups peut-être ? À suivre en tout cas.