Peut-on effectuer des contrôles d'alcoolémie sur le lieu de travail ?

De prime abord, il convient d'indiquer que conformément aux dispositions des articles L. 4111-1 3°, les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité définies par les livres Ier à V de la quatrième partie du code du travail et par les décrets pris pour leur application du Code du travail sont applicables aux établissements de santé, sociaux et médico-sociaux mentionnés à l'article 2 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.


Or, aux termes de l'article R. 4228-20 du Code du travail :


« Aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail.

Lorsque la consommation de boissons alcoolisées, dans les conditions fixées au premier alinéa, est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur, en application de l'article L. 4121-1 du code du travail, prévoit dans le règlement intérieur ou, à défaut, par note de service les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d'accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d'une limitation voire d'une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché. »


Par ailleurs, selon l'article R. 4228-21 :


« Il est interdit de laisser entrer ou séjourner dans les lieux de travail des personnes en état d'ivresse. »


En application de ces dispositions, l'autorité administrative a la possibilité de mettre en œuvre, de façon proportionnée, des procédures de contrôle nécessaires à une constatation objective de l'état d'alcoolémie d'un agent, par le biais d'un alcootest par exemple, et ce, afin d'apprécier si l'état d'ébriété de l'agent concerné lui permet ou non l'exercice de ses fonctions.


La jurisprudence précise que, pour être opposables, de telles procédures doivent cependant être expressément prévues par le règlement intérieur.


Le règlement peut, dans ce cadre, prévoir la possibilité pour l'employeur de recourir à des contrôles d'alcoolémie, notamment à l'éthylotest, si les modalités de ces contrôles en permettent la contestation et si, en raison des fonctions de l'agent, son état d'ébriété est de nature à exposer les personnes ou les biens à un danger (cf. Cass. soc., 22 mai 2002, n°99-45.878), peu important que, pour des raisons techniques, il s'effectue hors de l'établissement (cf. Cass. soc., 31 mars 2015, n°13-25436).


Dans deux arrêts rendus par sa Chambre sociale le 4 novembre 2015, la Cour de cassation souligne toutefois que l'employeur doit respecter les formalités de dépôt et de publicité du règlement intérieur, car à défaut les dispositions de celui-ci permettant de pratiquer un contrôle d'alcoolémie sont inopposables aux personnels (cf. Cass. soc., 4 novembre 2015, n°14-18.573 et n°14-18.574).


Autrement dit, il doit être soumis au préalable à l'avis du comité d'hygiène et sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et du comité technique d'établissement (CTE) et, en l'absence d'un tel document, le directeur ne peut contraindre à titre d'exemple un agent à réaliser une prise de sang.

Enfin, concernant la détention et/ou l'usage de substances illicites par un agent sur son lieu de travail, il pourrait être également envisagé de contrôler le casier de l'agent.


Toutefois, la jurisprudence n'autorise l'ouverture et la fouille des casiers ou armoires destinés à l'usage personnel de l'agent, qu'en présence de l'agent et après l'en avoir avisé (par exemple C.A.A. Lyon 12 décembre 2006, n°02LY01329).


Par conséquent, il est déconseillé de procéder à la fouille du casier personnel de l'agent car elle pourrait constituer une voie de fait engageant la responsabilité de l'établissement.


Le cas échéant, il pourrait être envisagé de solliciter du médecin du travail qu'il examine l'agent.


En effet, selon l'article R. 4624-34 du code du travail dispose :


« Indépendamment des examens d'aptitude à l'embauche et périodiques ainsi que des visites d'information et de prévention, le travailleur bénéficie, à sa demande ou à celle de l'employeur, d'un examen par le médecin du travail.

Le travailleur peut solliciter notamment une visite médicale, lorsqu'il anticipe un risque d'inaptitude, dans l'objectif d'engager une démarche de maintien en emploi et de bénéficier d'un accompagnement personnalisé.

La demande du travailleur ne peut motiver aucune sanction.

Le médecin du travail peut également organiser une visite médicale pour tout travailleur le nécessitant. »


Dès lors, en application de ce texte, l'établissement pourrait demander que l'agent se soumette à un examen médical auprès du médecin du travail.