Publié en août 2024
Sanction disciplinaire Abaissement d'échelon Comportement de l'agent Voie publique
Voir également :Une sanction disciplinaire vise en premier lieu à sanctionner un fait fautif commis dans l'exercice des fonctions. Mais il arrive que le comportement de l'agent, dans des actes relevant de sa vie privée, soit également sanctionné.
La jurisprudence est plutôt bien fixée et requiert des conditions strictes. La CAA de Marseille dans un arrêt n°09MA00085 du 30 novembre 2010 l'a admis dès lors que « les faits commis par un fonctionnaire en dehors du service peuvent constituer une faute passible d'une sanction disciplinaire lorsque, eu égard à leur gravité, à la nature des fonctions de l'intéressé et à l'étendue de ses responsabilités, ils ont eu un retentissement sur le service, jeté le discrédit sur la fonction exercée par l'agent ou ont gravement porté atteinte à l'honneur et à la considération qui lui sont portées » (voir également CAA de Nantes, 16 juillet 2018, n° 17NT02557). Certaines décisions montrent que la condition de publicité des faits cède devant leur gravité (CAA de Nantes, 22 avril 2016, n°14NT01834 pour un adjoint technique territorial principal condamné par la cour d'assises d'appel à dix ans d’emprisonnement pour des faits de viols sur mineur de 15 ans par ascendant ; CAA de Douai, 22 septembre 2020, n°19DA01552, FJH n° 084, 2020, p. 349 : révocation d’un aide-soignant qui avait fait l’objet de plusieurs condamnations pénales pour conduite en état alcoolique, y compris en récidive, et ce, malgré l’annulation de son permis de conduire ; CAA de Marseille, 26 novembre 2020, n°20MA00073, FJH n° 007, 2021, p. 27 : révocation pour des faits d’exhibition sexuelle).
Dans l'affaire portée devant la CAA de Toulouse et jugée le 2 juillet 2024 (n°22TL21317), une nouvelle illustration est donnée.
En l'espèce, Mme D..., agent des services hospitaliers qualifié titulaire, a été sanctionnée d'un abaissement d'échelon à l'échelon immédiatement inférieur à celui détenu (sanction du 2e groupe), au regard de son comportement violent vis-à-vis d'une automobiliste âgée de 72 ans, alors que Mme D… se rendait à son travail. L'altercation sur la voie publique qui l'a opposée à l'autre conductrice a nécessité l'intervention de la cadre de santé de l'établissement qu'une des collègues de travail appelait sur son téléphone portable pour solliciter son intervention, alors qu'elle n'arrivait pas à contenir Mme D..., laquelle aurait été en train de “ passer à tabac “ une conductrice. Si seule une main courante a été déposée par la victime, le directeur disposait de témoignages et le DRH a lui-même attesté ”avoir vu à la gendarmerie de Quillan la victime, en état de choc et sortant de chez son médecin et, lors de la séance du conseil de discipline, il a affirmé s'être rendu à la gendarmerie et y avoir vu la victime avec une pommette endommagée. Dans ces conditions, l'atteinte physique de la victime doit être tenue pour établie, nonobstant l'absence de témoignage direct et de certificat médical.”
Les juges ont apprécié la publicité des faits qui “se sont cependant déroulés sur la voie publique, à proximité de l'établissement, en présence de plusieurs personnes dont une aurait même filmé la scène. Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, ces faits ont eu une certaine publicité et ont également nécessairement donné une mauvaise image de l'établissement, qui était identifiable, dès lors, notamment, que la cadre de santé appelée et présente sur les lieux portait sa blouse de service.” La cour conclut que ces faits, mêmes isolés, "ont eu un retentissement sur le personnel, ont nui au crédit de l'établissement et s'avèrent, par eux-mêmes, incompatibles avec l'exercice de fonctions auprès de personnes vulnérables. Ils sont, par suite, fautifs et de nature à justifier une sanction.” Et la sanction du deuxième groupe retenue n'est pas disproportionnée. Sa requête est donc rejetée.