Ce jugement du tribunal administratif de Rouen, en date du 9 octobre 2025 (n° 2303416), illustre les précautions que doivent prendre les établissements lorsqu'ils reviennent sur une promesse d'emploi.
En l’occurrence, un couple exerçant en qualité d'assistants au CHU de Nantes entame des discussions quant à un éventuel recrutement au CHU de Rouen. Chacun est ensuite informé par courriel (en mai et juin 2022) de leur nomination quelques mois plus tard : Mme C en qualité de Chef de Clinique Universitaire – Assistant des Hôpitaux à compter du 2 novembre 2022 et Monsieur A en qualité de praticien hospitalier en urologie à compter du 1er janvier 2023.
Malheureusement, “par des courriels des 21 octobre 2022 et 2 novembre 2022, le chef du service urologie du centre hospitalier a informé respectivement M. A... et Mme C... de la suspension de leur recrutement”.
Mécontents de ce revirement, les praticiens saisissent le tribunal administratif avec deux arguments : les courriers les informant de leur nomination prochaine sont des décisions créatrices de droit et le CHU de Rouen n'a pas respecté les promesses de recrutement.
Sur le premier argument, le TA souligne que les courriers adressés en mai et juin 2022 ne sont que de "simples informations, les décisions créatrices de droits ne pouvant résulter que des actes de nomination eux-mêmes, lesquels ne sont pas intervenus".
Les requérants sont déboutés.
En revanche, le TA considère que Mme C et M.A apportent bien la preuve d'un engagement ferme et définitif non respecté. Le TA se fonde, pour ce faire, sur les courriers adressés et sur le fait qu' en septembre 2022, “les modalités de l’arrivée du couple et notamment leur date de prise de fonction se sont précisées et ont pris en compte les impératifs du couple” (notamment le congé de maternité futur de Mme C).
Ceci étant posé, reste à déterminer le préjudice. La location d'un box de stockage début novembre et d'un véhicule de déménagement début octobre sont ainsi intégralement pris en compte. Le CHU a vainement tenté de faire admettre l'imprudence du couple à démissionner sans recrutement finalisé mais le TA de Rouen a rejeté l'argument compte tenu des échanges en septembre 2022.
Le préjudice financier est également réparé, par référence aux rémunérations perçues au CHU de Nantes et des quelques mois travaillés ensuite. Le préjudice moral et de trouble dans leurs conditions d’existence sont évalués à la somme de 4 000 euros chacun (ils demandaient 15000 euros chacun).
Le centre hospitalier universitaire de Rouen est condamné à payer à M. A... la somme de 28 726 euros et à Mme C... la somme de 24 717 euros.
Le jugement du TA de Rouen est dans la ligne des précédentes jurisprudences (TA de Paris, 27 mars 2023, n°2122185, CAA de Nantes, 21 octobre 2016, n°15NT01100).