La commission de coordination gériatrique

I. Une composition inclusive

II. Les missions


RÉFÉRENCES

Article D.312-158 du Code de l'action sociale et des familles

Arrêté du 5 septembre 2011 relatif à la commission de coordination gériatrique mentionnée au 3° de l'article D. 312-158 du Code de l'action sociale et des familles et modifiant l'arrêté du 30 décembre 2010 fixant les modèles de contrats types devant être signés par les professionnels de santé exerçant à titre libéral et intervenant au même titre dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes


RÉSUMÉ

Instaurée suite à un rapport remis en 2009, et déterminée par un arrêté du 5 septembre 2011, la commission de coordination gériatrique a peiné à s'installer véritablement, faute d'un intérêt suffisant pour ses enjeux et de temps. Pourtant, sa mise en œuvre s'avère pertinente à l'heure où les personnes accueillies en EHPAD sont de plus en plus âgées et dépendantes.


 ANALYSE


C'est une disposition déjà un peu ancienne mais les établissements ne paraissent pas s'être réellement appropriés la commission de coordination gériatrique (CCG).

Mentionnée au détour de l'article D.312-158, 3°, du Code de l'action sociale et des familles, elle est présidée par le médecin coordonnateur. Une récente étude de la HAS met en évidence un réel manque d'intérêt des établissements pour cette instance (Fiche repère « La commission de coordination gériatrique », octobre 2018). Pourtant, c'est une obligation puisqu'elle est prévue par le CASF.

Sa composition et ses missions ont été précisées par l'arrêté du 5 septembre 2011.


I. Une composition inclusive

Elle est présidée par le médecin coordonnateur et sa composition est arrêtée comme suit :

1° Le directeur de l'établissement ou son représentant ;

2° Les médecins salariés de l'établissement ;

3° Le pharmacien gestionnaire d'une pharmacie à usage intérieur mentionnée aux articles R. 5126-1 et suivants du Code de la santé publique ;

4° Le cadre de santé ou l'infirmier diplômé d'État en charge de la coordination de l'équipe soignante au sein de l'établissement ;

5° Les infirmiers diplômés d'État salariés de l'établissement ;

6° Les psychologues de l'établissement ;

7° Les masseurs-kinésithérapeutes salariés de l'établissement ;

8° Les ergothérapeutes salariés de l'établissement ;

9° Les psychomotriciens salariés de l'établissement ;

10° L'ensemble des professionnels de santé intervenant dans l'établissement à titre libéral ;

11° Le pharmacien d'officine référent mentionné au premier alinéa de l'article L. 5126-6-1 du Code de la santé publique lorsque l'établissement ne dispose pas d'une pharmacie à usage intérieur ;

12° Un représentant du conseil de la vie sociale de l'établissement choisi parmi les membres mentionnés au 1° de l'article D. 311-5 du Code de l'action sociale et des familles c'est-à-dire uniquement des représentants des personnes accueillies ou prises en charge (qui sont au minimum au nombre de deux).


Toute personne que la commission souhaite entendre du fait de ses compétences propres peut assister en tant que de besoin à la séance de la commission.

Ce membre « invité » est donc librement choisi. Il peut s'agir de la famille d'un résident (hors membre du conseil de la vie sociale qui est appelé à siéger à un autre titre), voire le résident lui-même.

Ce peut être également d'autres praticiens spécialisés :

  • des professionnels du soin tels que les dentistes ou les pédicures,
  • des ORL, des ophtalmologistes pour prévenir toutes pertes ou déficiences sensorielles,
  • des pharmaciens pour prévenir les effets secondaires de certains médicaments couramment prescrits aux personnes âgées,
  • des spécialistes (gériatre, neurologue, psychiatre, urgentiste, biologiste, radiologue, etc.) pour aborder des thématiques spécifiques,
  • des spécialistes de la télémédecine pour améliorer la prise en soin des résidents,
  • des gestionnaires de cas MAIA pour aborder les conditions et les limites du maintien à domicile,
  • des professionnels des plateformes territoriales d'appui (PTA) ou à l'équipe de la coordination territoriale d'appui (CTA) pour expliquer l'organisation sur le territoire,
  • des professionnels des services polyvalents d'aide et de soins à domicile (SPASAD), des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) ou encore des services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés (SAMSAH) pour expliquer leur rôle et leur organisation,
  • des filières et des réseaux de soins (hospitalisation à domicile (HAD), réseau de soins palliatifs, oncologie) pour spécifier à quel moment recourir à leurs services…

La composition intègre l'ensemble des personnes intervenant au sein d'un EHPAD et assurant la prise en charge de la personne âgée, et ce, quel que soit son statut (salarié ou libéral). Le fait d'inclure un représentant du conseil de la vie sociale met en évidence le rôle convergent de la commission de coordination gériatrique. Elle est conçue comme un lieu d'échanges. Elle fait le lien entre les intervenants.


La commission de coordination gériatrique est réunie au minimum deux fois par an. Dans les faits, une réunion annuelle semble plus proche de la réalité aussi bien dans le secteur public que privé (avec une légère supériorité du public). Les professionnels de santé libéraux signataires du contrat mentionné à l'article R. 313-30-1 du Code de l'action sociale et des familles doivent participer à au moins une réunion dans l'année. Tout l'enjeu est naturellement de parvenir à un consensus sur les réunions ; ainsi, le midi ou le soir, éventuellement dans le cadre d'un repas voire d'un apéritif dînatoire (voir Fiche repère p. 7).


L'on peut même envisager une mutualisation avec des établissements voisins si les professionnels y interviennent. Cela permet de partager les pratiques, les informations, voire de s'inspirer et de s'approprier des pratiques. En effet, le médecin coordonnateur participe notamment à la mise en œuvre de réseaux gérontologiques coordonnés (voir D.312-158, 11°).


L'ordre du jour de la commission de coordination gériatrique est établi conjointement par le médecin coordonnateur et le directeur de l'établissement.


Il n'est pas indiqué que la commission rédige un règlement intérieur mais il peut paraître opportun de dresser succinctement de grandes lignes de fonctionnement portant sur la fréquence des réunions, leur durée prévisionnelle, la restitution des séances (la Fiche repère de la HAS propose un modèle de compte rendu très synthétique), les modalités de validation des propositions… La plus grande souplesse doit présider dans cette organisation.


II. Les missions

La commission de coordination gériatrique est consultée dans la même sphère de compétence que le médecin coordonnateur :

1° Le projet de soins de l'établissement et sa mise en œuvre (le médecin coordonnateur élabore avec l'équipe soignante le projet général de soins) ;

2° La politique du médicament, dont la liste des médicaments à utiliser préférentiellement dans les prescriptions dispensées aux résidents de l'établissement, ainsi que celle relative aux dispositifs médicaux, produits et prestations mentionnés à l' article L. 165-1 du Code de la sécurité sociale ; l'un des premiers risques est celui de l'erreur de prescription, voire du mésusage d'un médicament, notamment parce que la prescription gériatrique est spécifique et que les médecins ne sont peut-être pas suffisamment formés à ces spécificités. Le décret du 9 mars autorise la création d'un traitement de données à caractère personnel relatif à l'activité et à la consommation de soins dans les établissements ou services médico-sociaux, dénommé « RESID-ESMS ». Ce traitement de données permet d'identifier l'activité et la consommation de soins dans les établissements et services médico-sociaux accueillant des personnes âgées et handicapées.

3° Le contenu du dossier type de soins mentionné au 8° de l'article D. 312-158 du Code de l'action sociale et des familles qui est élaboré par le médecin coordonnateur ;

4° Le rapport annuel d'activité médicale de l'établissement mentionné au 9° de l'article D. 312-158 du Code de l'action sociale et des familles ; ce rapport est établi avec le concours de l'équipe soignante par le médecin coordonnateur et signé conjointement avec le directeur. Dans ce cadre, la commission peut formuler toute recommandation visant à améliorer la prise en charge et la coordination des soins qui est alors annexée au rapport ;

5° Le contenu et la mise en œuvre de la politique de formation des professionnels de santé exerçant dans l'établissement ;

6° L'inscription de l'établissement dans un partenariat avec les structures sanitaires et médico-sociales et les structures ambulatoires du secteur au titre de la continuité des soins.

La commission de coordination gériatrique a également pour mission de promouvoir les échanges d'informations relatives aux bonnes pratiques gériatriques, notamment auprès des professionnels de santé intervenant à titre libéral dans l'établissement.

De fait, le médecin coordonnateur est chargé de réunir dans le cadre de la commission de coordination gériatrique les professionnels de santé libéraux exerçant dans l'EHPAD afin de les consulter sur le projet de soins, et, notamment les protocoles de soins gériatriques. Le médecin coordonnateur est l'interface. Son rôle est crucial ; il exerce son autorité fonctionnelle sur les professionnels de l'établissement (salariés) et respecte évidemment l'indépendance des professionnels libéraux qui interviennent dans la structure. Tous les intervenants libéraux exerçant dans l'institution doivent adhérer au règlement de fonctionnement de celle-ci, reconnaissant ainsi l'existence et les missions du médecin coordonnateur. Rappelons que la LFSS 2019 permet au médecin coordonnateur, sous réserve de clauses spécifiques à son contrat, d'intervenir auprès d'un ou plusieurs résidents comme médecin traitant (modification de l'article L.314-12 du Code de l'action sociale et des familles) et de prescrire, ce qui a pu être dénoncé par certains.

L'ensemble des recommandations et avis émis par la commission de coordination gériatrique est transmis à l'instance compétente de l'organisme gestionnaire de l'établissement.


L'intérêt de la CCG est d'être un lieu d'échanges entre tous les intervenants et de faciliter ainsi leur appropriation des pratiques retenues, des choix opérés, etc. En effet, les professionnels libéraux ne sont pas nécessairement au fait des contraintes d'un EHPAD, ou de ses difficultés propres ; la commission de coordination gériatrique permet de les impliquer a minima.


Le bilan dressé par la HAS est en demi-teintes, ce qui est certes regrettable et il existe de fortes disparités. La commission a certes un rôle consultatif, mais l'objectif est qu'elle soit « force de proposition » « sur des thématiques contribuant à un bon accompagnement du résident et à une bonne qualité de vie dans l'établissement ».



FICHE REPÈRE


ILLUSTRATION SUR L'ÉPIDÉMIE DE GRIPPE

Dans un EHPAD, suite à des décès consécutifs à une épidémie de grippe, une aide-soignante a demandé s'il ne pouvait pas être abordé, dans le cadre de la CCG, la sensibilisation des familles aux gestes simples qui peuvent limiter l'épidémie (en diffusant une information non seulement sur le lavage systématique des mains, mais aussi sur le confinement nécessaire, etc.) Cette suggestion a été retenue et le Médec (médecin coordonnateur) a proposé, lors de la CCG, de sensibiliser les familles aux gestes simples pour limiter l'épidémie de grippe. Il s'est notamment rapproché de la CPAM locale afin de disposer d'affiches et de prospectus concernant la prévention de la grippe.


ILLUSTRATION SUR LES SERVICES À DOMICILE

Dans un EHPAD, sont invités régulièrement à participer à la CCG, les responsables des services à domicile et l'infirmier coordinateur du SSIAD. Cet échange permet à tous ces acteurs d'échanger sur leurs pratiques et le parcours en amont et en aval de l'entrée en établissement des résidents.

Dans un EHPAD qui vient d'accueillir une personne handicapée vieillissante, auparavant accompagnée à domicile par un SAMSAH (Service d'Accompagnement Médico-social pour Adultes en Situation de Handicap), des membres de l'équipe du SAMSAH sont venus présenter leurs missions et leur expertise concernant la rédaction du projet de vie individualisé, ce qui a permis de tenir compte de tout le travail réalisé en amont de l'entrée en établissement.


ILLUSTRATION SUR LA FORMATION

Dans un EHPAD, suite à une présentation par un ergothérapeute, sur les possibilités de lutter contre la constipation en travaillant sur les organes mous, la directrice a découvert une autre façon de traiter les problèmes de constipation auxquels sont souvent soumis les résidents. Elle a ainsi pu présenter les apports de ce travail lors de la CCG.


ILLUSTRATION SUR LA MUTUALISATION DES CCG

Dans la région lilloise, un Médec travaille dans 2 EHPAD collaborant chacun avec 7 médecins traitants et 6 masseurs-kinésithérapeutes. Après avoir été confronté à des difficultés d'organisation de la CCG dans chacun des établissements, le Médec a proposé à l'ensemble des médecins et des équipes de direction des 2 établissements d'organiser la CCG, en alternance, dans un établissement puis dans l'autre en début de soirée suivi d'un dîner. Cette solution a permis au Médec d'organiser la CCG 2 fois par an avec une plus grande participation des médecins traitants.