Le recrutement contractuel sur emploi permanent

PLAN

I. Le respect du principe d'égal accès aux emplois publics

II. La candidature des agents contractuels hospitaliers

A. La réception des candidatures

B. Les entretiens

C. La décision du directeur


I. RÉFÉRENCES

Loi n°86-33 du 9 janvier 1986, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière

Décret n° 2019-1414 du 19 décembre 2019 relatif à la procédure de recrutement pour pourvoir les emplois permanents de la fonction publique ouverts aux agents contractuels

Décret n°91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière


II. RÉSUMÉ

L'accès aux emplois permanents de la fonction publique susceptibles d'être occupés par des agents contractuels est organisé différemment depuis la loi de transformation de la fonction publique. Une procédure de recrutement spécifique est prévue, qui traduit la volonté d'encadrer, dans un souci d'égalité, les candidatures de contractuels, mais au prix d'une lourdeur certaine.


III. ANALYSE


Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents sont occupés par des fonctionnaires. Tel est, en substance, le postulat de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 qui n'a jamais été modifié.

Naturellement, chaque loi de fonction publique spécifique est venue préciser les exceptions et ainsi, l'article 3 de la loi du 9 janvier 1986 relative à la fonction publique hospitalière.

Initialement, seuls les emplois supérieurs de directeur général et secrétaire général de l'administration générale de l'assistance publique à Paris, de directeur général de l'administration de l'assistance publique à Marseille et directeur général des hospices civils de Lyon étaient ouverts au recrutement contractuel. Puis, en 2005, la dérogation a été élargie aux emplois de directeur général des centres hospitaliers régionaux de Toulouse, Bordeaux, Nancy, Montpellier, Lille, Strasbourg. La loi dite HPST du 21 juillet 2009 a précisé les autorités compétentes pour les nominations, puis la loi du 5 juillet 2010 de rénovation du dialogue social a ensuite procédé à une réécriture sans grand impact de l'article 3 de la loi et ce n'est qu'avec la loi de transformation de la fonction publique, du 6 août 2019, que l'article a été à nouveau refondu.

À côté de ces dispositions, le recrutement des agents contractuels a été prévu aux articles 9 et suivants de la loi du 9 janvier 1986. De façon dérogatoire à l'article 3 précité de la loi du 13 juillet 1983, l'article 9 prévoit les possibilités de recrutement lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient, notamment lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires hospitaliers susceptibles d'assurer ces fonctions ou lorsqu'il s'agit de fonctions nouvellement prises en charge par l'administration ou nécessitant des connaissances techniques hautement spécialisées.

Selon le Conseil d'État, dès que la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient, il peut y avoir un tel recrutement (CE, Mlle X., 24 juillet 2009, n° 311850). Et la nature « permanente » du recrutement sera déterminée par rapport aux besoins permanents et durables de l'employeur couverts par l'agent.

En l'occurrence, le contrat peut être établi à durée déterminée pour une durée maximale de six ans ou en CDI.

L'article 9-1 de la loi prévoit les recrutements temporaires de contractuels dans différentes hypothèses, soit sur emploi permanent (remplacement, vacance d'emploi), soit pour accroissement temporaire d'activité ou accroissement saisonnier d'activité.

D'autres contrats ont été intégrés par la loi du 6 août 2019 (contrat de projet, recrutement en CDI d'un agent déjà en CDI dans une autre fonction publique).

Un décret du 19 décembre 2019 contient des dispositions générales et des dispositions propres aux contractuels de droit public hospitaliers ; l'article 32 de la loi du 13 juillet 1983 a été ainsi complété pour garantir l'égal accès aux emplois publics. Sont exclus de cet encadrement les emplois de directeurs de CHU et CHR (autrement dit, ceux visés par l'article 3 de la même loi). Les dispositions intégrées dans le décret du 6 février 1991, aux articles 3-2 à 3-10 ne concernent pas toutefois tous les recrutements d'agents contractuels, mais ceux sur le fondement de l'article 9 et de l'article 9-1, I et II.

Les recrutements pour pourvoir un emploi sur le fondement de l'article 9-4 sont régis par les dispositions du même chapitre Ier du décret du 19 décembre 2019, c'est-à-dire les dispositions communes ; autrement dit, le contrat de projet est soumis aux dispositions générales et, étant un contrat conclu pour occuper un emploi non permanent, les articles 3-3 à 3-10 du décret du 6 février 1991 ne lui sont pas applicables (Voir « Le contrat de projet », FDH n° 420, p. 6071).


Ces nouvelles dispositions sont applicables aux recrutements concernés depuis le 1er janvier 2020.


I. LE RESPECT DU PRINCIPE D'ÉGAL ACCÈS AUX EMPLOIS PUBLICS


Le décret du 19 décembre 2019 est très explicite : l'accès aux emplois permanents de la fonction publique susceptibles d'être occupés par des agents contractuels est organisé, dans le respect du principe d'égal accès aux emplois publics et des garanties prévues aux articles 6, 6 bis, 6 ter A, 6 ter, 6 quinquies et 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983.

Les modalités de la procédure de recrutement sont mises en œuvre par l'autorité compétente dans des conditions identiques pour l'ensemble des candidats à un même emploi permanent de la fonction publique.

L'autorité compétente peut prévoir des modalités complémentaires à la procédure de recrutement qu'elle organise pour l'accès aux emplois permanents qu'elle décide de pourvoir, notamment pour éclairer l'appréciation portée sur chaque candidature reçue. Par exemple, des tests, des mises en situation peuvent apporter un éclairage pratique.

En effet, l'appréciation est fondée sur les compétences, les aptitudes, les qualifications et l'expérience professionnelles, le potentiel du candidat et sa capacité à exercer les missions dévolues à l'emploi permanent à pourvoir. Il n'y a pas de grille d'appréciation, bien que son intérêt semble indiscutable mais cela n'empêche pas d'établir une telle grille, même simplifiée, portant sur ces six items.


L'autorité compétente procède à la publication, par tout moyen approprié, des modalités de la procédure de recrutement applicable aux emplois permanents susceptibles d'être occupés par des agents contractuels qu'elle décide de pourvoir.

Elle assure la publication de l'avis de vacance ou de création de l'emploi permanent à pourvoir sur l'espace numérique commun aux trois fonctions publiques dans les conditions prévues par le décret du 28 décembre 2018. Lorsqu'il n'est pas prévu d'obligation de publication sur cet espace numérique commun, elle assure la publication de l'avis de vacance ou de création sur son site internet ou, à défaut, par tout moyen assurant une publicité suffisante.

L'avis de vacance ou de création de l'emploi est accompagné d'une fiche de poste qui précise notamment les missions du poste, les qualifications requises pour l'exercice des fonctions, les compétences attendues, les conditions d'exercice et, le cas échéant, les sujétions particulières attachées à ce poste. Elle mentionne le ou les fondements juridiques qui permettent d'ouvrir cet emploi permanent au recrutement d'un agent contractuel.

La fiche de poste indique également la liste des pièces requises pour déposer sa candidature et la date limite de dépôt des candidatures.

Les candidatures sont adressées à l'autorité mentionnée dans l'avis de vacance ou de création de l'emploi permanent à pourvoir dans la limite d'un délai qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à un mois à compter de la date de publication de cet avis. L'on comprend bien que ce mode de recrutement, pour pourvoir au remplacement d'un agent par exemple, peut ne pas supporter un mois de délai ; c'est l'une des hypothèses où l'urgence permettra de passer outre la publicité d'un mois minimum.

L'autorité compétente accuse réception de chaque candidature.


II. LA CANDIDATURE DES AGENTS CONTRACTUELS HOSPITALIERS


Tout d'abord, la procédure prévue aux articles 3-3 à 3-10 du décret du 6 février 1991 ne concerne que les contractuels susceptibles d'être recrutés :

  • dans le cadre de l'article 9 (1er alinéa), c'est-à-dire lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifie. Il faut au préalable établir le constat du caractère infructueux du recrutement d'un fonctionnaire sur cet emploi avant d'examiner les candidatures, même lors du renouvellement. Mais aucune disposition ne détermine comment on établit le caractère infructueux du recrutement d'un fonctionnaire ;
  • ou pour assurer le remplacement momentané d'un agent (article 9-1, I)
  • ou pour faire face à la vacance temporaire d'emploi lorsque les besoins de continuité du service le justifie et dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire (article 9-1, II). Le contrat est conclu pour une durée déterminée qui ne peut excéder un an. Il ne peut l'être que lorsque la communication requise à l'article 36 a été effectuée c'est-à-dire la publicité des emplois vacants ou dont la vacance a été prévue. L'on peut pourvoir les emplois vacants soit par la procédure de changement d'établissement (d de l'article 32 de la loi du 9 janvier 1986) soit par détachement de fonctionnaires titulaires. Le renouvellement du contrat dans la limite d'une durée totale de deux ans (= période initiale incluse) n'est possible que si la procédure de recrutement pour pourvoir l'emploi par un fonctionnaire n'a pu aboutir.

Cette procédure ne s'applique pas aux recrutements dans les emplois mentionnés aux 1° et 2° de l'article 3 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée et aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 6143-7-2 du code de la santé publique, c'est-à-dire directeur de CHU, directeur de CHR et directeur d'EPS.

Ensuite la procédure de recrutement elle-même est très précise.


A. La réception des candidatures


Dès la publication de l'avis de création ou de vacance de l'emploi à pourvoir, la personne contractuelle peut se porter candidate.

S'il s'agit de pourvoir un emploi lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifie (article 9, alinéa 1er), l'autorité investie du pouvoir de nomination doit d'abord établir le constat du caractère infructueux du recrutement d'un fonctionnaire sur cet emploi. Ce n'est qu'ensuite que l'on pourra procéder à l'examen des candidatures. D'ailleurs, la même obligation s'impose également en cas de renouvellement du contrat : le renouvellement du contrat n'est possible que lorsque l'autorité investie du pouvoir de nomination a établi préalablement le constat du caractère infructueux du recrutement d'un fonctionnaire sur cet emploi (art.3-3).


L'autorité investie du pouvoir de nomination dans l'établissement, ou son représentant, accuse réception de la candidature et en vérifie la recevabilité au regard des dispositions législatives et réglementaires régissant l'accès à l'emploi permanent à pourvoir et son occupation. Autrement dit, seront vérifiées ici les conditions tenant au poste lui-même mais également les conditions requises pour postuler à tout emploi public et détaillées à l'article 3 du décret du 6 février : titres, aptitude, état pénal (casier, interdiction de tout ou partie de ses droits civiques), position régulière au regard des obligations de service national, certificats médicaux.

Elle opère un premier tri et peut, le cas échéant, écarter toute candidature qui, de manière manifeste, ne correspond pas au profil recherché pour l'emploi permanent à pourvoir, au regard notamment de la formation suivie et de l'expérience professionnelle acquise. La notion de « manière manifeste » induit que l'inadéquation entre la candidature et le profil de poste est évidente et le directeur dispose quand même d'une large appréciation.


B. Les entretiens


À l'issue de la pré-sélection qui est opérée et qui permet d'écarter d'emblée les candidatures irrecevables, les candidats sont convoqués à un ou plusieurs entretiens de recrutement.

Le ou les entretiens de recrutement sont conduits par une ou plusieurs personnes relevant de l'autorité investie du pouvoir de nomination dans l'établissement. Ils sont organisés dans des conditions adaptées à la nature de l'emploi à pourvoir et aux responsabilités qu'il implique.

La seule exception prévue est celle d'un recrutement inférieur ou égal à 6 mois sur emploi permanent pour un remplacement (article 9-1, I) ; le directeur peut se dispenser de l'entretien. Évidemment, et sauf hypothèse où le contractuel a déjà exercé dans l'établissement, un entretien est toujours pertinent.

En outre, lorsque le recrutement est organisé pour l'accès à un emploi permanent dont la nature des compétences, le niveau d'expertise ou l'importance des responsabilités le justifie, ou lorsque l'emploi est à pourvoir par un contrat à durée indéterminée, le ou les candidats présélectionnés sont convoqués à un ou plusieurs entretiens de recrutement conduits par au moins deux personnes représentant l'autorité investie du pouvoir de nomination dans l'établissement, ensemble ou séparément. L'avis d'une ou plusieurs autres personnes peut en outre être sollicité. L'autorité investie du pouvoir de nomination dans l'établissement définit les emplois permanents soumis à cette procédure.

Ainsi, ce n'est pas « l'autorité investie du pouvoir de nomination » qui conduit les entretiens mais « une ou plusieurs personnes relevant » de son autorité.

Le ou les entretiens sont également l'occasion de préciser les obligations pesant sur l'agent. Ici, l'information est limitée puisqu'elle porte sur les obligations déontologiques prévues aux articles 25, 25 septies et 25 octies de la loi du 13 juillet 1983 susvisée et aux manquements sanctionnés par les articles 432-12 et 432-13 du Code pénal. Il s'agit des interdictions d'activités privées lucratives (et leurs dérogations). Il ne faut pas en déduire que le contractuel n'est pas soumis aux autres obligations (secret, discrétion, obéissance hiérarchique et exécution personnelle des tâches confiées) car l'article 1-1 du décret du 6 février 1991 y soumet tous les agents contractuels. À ce stade de la procédure, l'entretien sert à « fixer » le cadre d'exercice des fonctions au regard d'éventuelles autres activités lucratives. Il est entendu que l'ensemble des obligations devront être portées à la connaissance de l'agent, par renvoi dans son contrat à la réglementation en vigueur, au règlement intérieur qui les mentionne ou tout autre document les reprenant.


C. La décision du directeur


À l'issue du ou des entretiens de recrutement, un document précisant les appréciations portées sur chaque candidat présélectionné au regard de ses compétences, aptitudes, qualifications et expérience professionnelles, potentiel et capacité à exercer les missions dévolues à l'emploi à pourvoir est rempli par la ou les personnes ayant conduit le ou les entretiens. Ce document est transmis à l'autorité investie du pouvoir de nomination dans l'établissement.

La question de la nature juridique de ce document, qui semble être un document préalable à la décision du directeur, doit se poser. En effet, il faut établir une telle synthèse pour chaque candidat présélectionné et ce document contenant des appréciations, voire jugement de valeur, sur le candidat s'analyse en un document communicable à l'intéressé qui le demande (au sens de l'article L.311-6 du code des relations entre le public et l'administration).

L'autorité investie du pouvoir de nomination dans l'établissement décide de la suite donnée à la procédure de recrutement et informe, par tout moyen approprié, les candidats non retenus de la décision de rejet de leur candidature. Il faudra prendre soin d'assurer la traçabilité de cette information.