Mesure d'isolement en soins psychiatrique sans consentement : le Conseil constitutionnel s'attaque (encore) à l'article L.3222-5-1 du CSP

Les pratiques d'isolement et de contention constituent une privation de liberté d'une personne prise en charge en soins psychiatriques sans consentement qui ne peuvent être décidées que par un psychiatre pour une durée limitée lorsque de telles mesures constituent l'unique moyen de prévenir un dommage immédiat ou imminent pour elle-même ou autrui.

L'article L.3222-5-1 du code de la santé publique, qui encadre cette pratique a été plusieurs fois contesté devant le Conseil constitutionnel.

Ainsi, à la suite de sa décision DC n° 2020-844 QPC du 19 juin 2020, l'article a été modifié pour en fixer les durées.

Puis, la loi n°2022-46 du 22 janvier 2022, renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire, a précisé les personnes informées du renouvellement de ces mesures en sus du juge des libertés et de la détention : au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical.

Le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les deux premières phrases du paragraphe I de l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, dans leur rédaction issue de la loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique (Décision n° 2023-1040/1041 QPC du 31 mars 2023). Autrement dit, l’absence de notification au patient placé en isolement ou sous contention de son droit à l’assistance d’un avocat n'est pas contraire à la Constitution. Au demeurant, les conditions dans lesquelles un patient est assisté ou représenté par un avocat devant le juge des libertés et de la détention saisi d’une demande de mainlevée d’une mesure d’isolement ou de contention sont prévues par l’article L. 3211-12-2 du code de la santé publique, dont le Conseil constitutionnel n’était pas saisi. 

Le juge des libertés et de la détention a été remplacé, dans le texte, par le tribunal judiciaire et le magistrat du siège du tribunal judiciaire (II de l'article) à compter du 1er septembre 2024.

Mais, le CC n'était saisi que d'une partie de l'article, et spécifiquement son I.

Le Conseil constitutionnel vient de déclarer l'inconstitutionnalité d'une phrase de l'article L.3222-5-1 en son II. En effet, la notion de “personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée” est relativement imprécise s'agissant d'un majeur protégé (Décision n°DC 2024-1127 QPC du 5 mars 2025). “10. Toutefois, lorsqu’il apparaît au cours de l’hospitalisation que le patient placé à l’isolement est un majeur protégé, ni les dispositions contestées ni aucune autre disposition législative n’imposent au médecin d’informer du renouvellement de l’isolement la personne chargée de la mesure de protection juridique. Or, en l’absence d’une telle information, le majeur protégé peut être dans l’incapacité d’exercer ses droits, faute de discernement suffisant ou de possibilité d’exprimer sa volonté en raison de l’altération de ses facultés mentales ou corporelles. Il est alors susceptible d’opérer des choix contraires à ses intérêts” : les “mots « ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt dès lors qu’une telle personne est identifiée » figurant au premier et au cinquième alinéas du paragraphe II de l’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique, sont contraires à la Constitution.”

Toutefois, les mesures ayant été prises sur le fondement de ces dispositions ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité.

S'agissant de l'entrée en vigueur de cette inconstitutionnalité, le Conseil constitutionnel énonce que les dispositions déclarées contraires à la Constitution, dans leur rédaction contestée, ne sont plus en vigueur, ce qui n'est pas exactement le cas quand on consulte la version actuelle de l'article L.3222-5-1. 

Jurisprudence
Le point sur
Le point sur web
Questions-réponses